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L'homme qui n'a pas d'étoile
31 mai 2014

Ma grande soeur

Ma soeur.

Si je devais t'écrire un jour pour te dire ce que j'ai sur le coeur, j'aimerais que tu lise ces mots. J'aimerais que tu tombes sur ce texte et que tu puisses savoir combien j'ai souffert de ton manque d'affection à mon égard. 
Toi la menteuse, la cruelle, la première fille qui m'a fait souffrir.

Au plus profond de ma mémoire, pourtant, je me rappelle de ta gentillesse et de ta protection lorsque je n'étais qu'un tout petit enfant. Je me rappelle du grand lit où nous dormions blottis contre toi, notre petit frère et moi. Comme il faisait bon de te savoir près de nous quand notre mère était partie où même parfois lorsqu'elle était là... mais plus pour nous. 
Je me souviens de ces matins d'hiver où les oiseaux venaient mangés le pain que nous leurs donnions tout près des fenêtres de notre petite maison. Je me souviens des couvertures chaudes et des chats qui dormaient avec nous et de l'odeur du chocolat chaud fait maison et du lait cuisant dans la casseroles sur le fourneau dans la cuisine. Que les souvenirs sont doux. Oui, grande soeur, je me sentais en sécurité de te savoir là. Tu t'occupais bien de nous et à cette époque, tu me protégeais. Tu remplaçais notre mère lorsqu'elle partait travailler ou lorsqu'elle avait trop bu. C'était surtout ça, le problème... 
Je me rappelle des promenades en été. Nous ne devions pas courir. Parce que si nous tombions, tu te faisais disputer par notre mère. Et lorsque j'écris disputer... le mot est faible. Je ne savais pas alors. J'ai dû grandir pour m'en rendre compte. Je pleurais, parfois, lorsque tu étais battue par notre mère. 

Mais je me souviens aussi des moins bons moments. 
Je me souviens de la première fois que tu m'as repoussé pour rester seule avec notre petit frère que tu as dit franchement et méchamment, préféré. Moi, je n'étais pas assez gentil, pour toi. Pourquoi ? Je l'ignorai toujours. Pourquoi m'avoir rejeter comme un paria alors que j'étais un petit enfant ? Moi qui t'aimait tant, grande soeur. J'en ai tellement souffert ce jour-là. J'ai pleuré toute la nuit dans mon lit caché sous mes draps pour étouffer mes sanglots. Est-ce à ce moment-là que j'ai été banni de ton coeur ? Peut-être. Ou bien avant... 

Je me souviens de ce jour d'école. C'était mes premiers jours...
Tu m'a giflé alors que je n'avais rien fait. Je n'oublierai pas cette gifle. Elle ne fut plus la dernière. D'autres ont suivies. De l'institutrice, de l'instituteur... mais surtout de toi. C'est celles-là qui faisaient le plus mal à mon esprit. Tu étais là pour me protéger. Je n'ai pas compris pourquoi, toi la grande soeur, tu me faisais cela. 
Je n'ai plus trouvé la paix depuis ce jour. 

Je regardais mes amis avec leur grandes et petites soeurs. Je pensais que la situation était la même pour eux que pour moi. Mais non... eux, ils étaient heureux et cajolés par leurs grandes soeurs. Moi, non.
Lorsque j'ai grandi, j'ai menti. Je me suis inventé une gentille soeur. La meilleure au monde. La soeur parfaite.

En grandissant, j'ai vu combien tu étais maltraitée par notre mère. 
J'ai essayé d'être avec toi. Mais tu me repoussais de plus belle. 
J'ai été ton complice lorsque tu es devenue une femme. Je ne disais rien lorsque tu rejoignais tes petit-amis. Je suis toujours resté muet pour te protéger afin que tu ne sois pas battue par notre mère. 

Je me souviens de ton départ. Nous ne savions où tu allais. Enfin, si moi je savais. Tu partais avec ton futur mari. Vous alliez faire votre vie. Je n'ai rien dit à notre petit frère qui a pleuré toute la nuit. Comme c'était cruel de ne pas le mettre dans la confidence... mais tu m'avais fait jurer de ne rien dire. J'ai tenu parole. Je pense que notre frère ne m'a jamais pardonner ma fidélité envers toi. 
C'était une bien cruelle mission que tu m'imposais. Cela a forgé mon caractère. Tu t'es servi de moi. C'était cruel... comme toi. 

Je me souviens de ce matin où tu rentras à la maison après une année où nous étions sans nouvelles. Je me suis jeté dans tes bras. Tu ne m'as pas repoussé. J'étais pourtant un grand garçon de 12 ans. 
J'ai pensé alors que le cauchemar était fini et que j'avais enfin retrouvé l'amour de ma grande soeur. Mais par la suite, j'ai pu constater amèrement que je n'étais que le frère en second, derrière mon petit frère et tes futurs beaux-frères.

Alors, j'ai bâti une légende. De la soeur parfaite que tu étais à mon esprit auprès de mes amis garçons et filles, tu es devenue encore plus parfaite. La soeur idéale. Mais tu n'existais que dans mon imaginaire.

Tu ne m'as jamais aimé.
J'ai bâti alors une mère parfaite. Un père mort parfait. Un frère parfait. En résumé, une famille aimante et parfaite.
Et lorsque je me rendais compte que je mentais... alors j'ai décidé de me bâtir un jour, un pays parfait. Je n'ai pas réussi. Enfin si... dans mon imagination. Mon pays est parfait. J'aurais voulu faire comme... lui... qui avait bâti un pays parfait. 

C'est ainsi qu'à 16 ans, n'expérant plus rien, je laissais immergé de mon être, le monstre sans nom. 
Tu l'as vu une fois, toi le monstre. Tu ne m'as jamais plus approché. Tu ne m'as jamais plus frapper. Pour la première fois, j'ai pu lire la peur dans ton visage. Tu n'as plus jamais osée te confronter à moi.
Avant, tu me narguais et me maltraitais, protégée par ton mari. 
Moi, je savais exactement où en étaient les choses. Je ne me suis presque plus jamais fait d'illusions sur toi.
Tu es l'artisane de ma tristesse et de mes premières désillusions. 

Je n'ai jamais eu de véritables tendresses de ta part. Je pensais que ce n'était pas utile. 
Tu disais à notre petit frère que j'étais le chouchou de notre mère. Tu te trompais. Ta jalousie et ton amertume encore présente t'aveuglait.
Je n'avais plus de tendresse de notre mère depuis très longtemps. La dernière fois que notre mère m'a tenue dans ses bras, je devais avoir dix ans. Et je peux compter les fois où je l'ai embrassé... comme toi.
Toi, je sais exactement combien de fois je t'ai embrassé et tu m'as embrassé. 

J'ai souvent pensé que toutes les filles étaient comme toi. Mais je sais qu'il n'en est rien. La tendresse existe. Mais je n'y ai pas été habitué car tu ne me l'as jamais enseigné. 
Ta souffrance, car tu souffrais, tu la rejetais sur moi. Que de douleurs j'ai eu... 
Je sais que tu me faisais payer la violence de notre mère envers toi. Mais je ne dois jamais te pardonner. Car tu n'as aucunes excuses du mal que tu m'as fait. Je n'étais pas la cause et de cette violence, non physique mais psychologique, je l'ai subi moi-aussi. 

Tu n'avais pas le droit de me maltraiter physiquement et psychologiquement. 
Tu es un monstre, comme notre mère, et l'image que tu donnes à cette société n'est pas véritable. Tu portes un masque d'une femme élégante et plutôt jolie. Mais tu n'es qu'un monstre qui a un nom. 

Je ne t'aime pas. Et je ne t'aimerai jamais. 

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